Dans le déplacement aux confins du possible qu’est l’utopie, l’imaginaire se déploie, aimanté par le lointain. L’année des trente ans du Centre Pompidou, au cœur d’un espace sensible élargi, l’Ircam inscrit la prospective musicale sous le signe de l’utopie mêlée d’exotisme. Edgard Varèse coupant les ponts avec l’Europe pour vivre la modernité aux États-Unis, Karlheinz Stockhausen rencontrant l’Orient, Jonathan Harvey inventant aujourd’hui la scène lyrique où se croisent le Bouddha et Richard Wagner… ces aventures singulières se sont toutes envolées hors des terres natales. L’ailleurs fonde le «sans lieu» de l’utopie, le déplacement révoque l’embarras des héritages et des origines assignées.
Apparentée à l’esprit utopique, l’attitude expérimentale considère la réalité comme invention et tâche perpétuelles. Elle effectue des essais ou des études qui ne réduisent pas l’éventail des possibles. Qu’en serait-il si… ? Cette question contagieuse, la question de l’Ircam, appartient pleinement à la création qui ne vient pas «doubler» le monde. Elle crée des espaces différents et séparés (Emmanuel Nunes), des lieux absolument autres. Plus fertiles que la nostalgie pétrifiée des grandes utopies historiques fracassées, ces voyages imaginaires dessinent un écart ou un jardin proche.
Un autre méridien.
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